mercredi 9 janvier 2013

Sarkozy, l'élu des vieux

[...] L'analyse démographique du vote de 2007 montre que Sarkozy a eu 44% des votes des plus de 65 ans au premier tour. Plus qu'aucun président de droite, Sarkozy a été l'élu des vieux. Pourquoi? Parce que la France a été terrorisée par les émeutes de 2005, qui étaient un soulèvement de la jeunesse. Cette peur a été réactivée par les incidents de la gare du Nord, en mars 2007, juste avant l'élection présidentielle. La question des retraites, c'est l'émergence de la démographie au cœur du problème politique français.
L'idée d'ajuster le temps de travail sur la durée de vie n'est pas scandaleuse. Ce qui a été étrange dans cette réforme, c'est l'annonce, dès le départ, que les retraités (l'électorat sarkozyste) ne seraient pas touchés, et donc que le coût de l'ajustement serait supporté par les jeunes. Cette réforme censée dynamiser le pays reflète, en vérité, le fait que le pouvoir sarkozyste est un pouvoir des vieux. Tous les arbitrages se font contre les jeunes.
[...] On a un peu de mal à imaginer que des jeunes de 15 ans puissent se soucier vraiment de leur retraite. Par contre, l(oppression économique des jeunes est réelle.
La proportion des jeunes qui font des études supérieures est à peu près égale depuis 1995, jamais les jeunes générations n'ont été aussi bien formées. Les générations d'analphabètes sont à la retraite.
On est dans une société loufoque, qui dépense pas mal d'énergie sur l'éducation de se jeunesse et qui, ensuite, adhère à un système économique qui assure l'écrasement de la jeunesse et de la baisse de son niveau de vie.
C'est un gaspillage d'énergie énorme. Les jeunes sont assez conscients de ce qui les attend sur le marché du travail. Et donc j'imagine qu'ils ne sont pas très contents. La nouveauté de la période, c'est qu'à part les 1% d'en haut de la structure sociale, plus personne ne profite du système.
En 1995, dans les standards occidentaux, on estimait que les 20% des classes moyennes supérieures ayant fait des études ramassaient 50% de la richesse.
Aujourd'hui, ces mêmes 20% stagnent ou ont des revenus en baisse. On est dans un processus de réunification de la société par le bas : une mécanique inexorable qui écrase les différentes catégories, en commençant par les plus faibles : jeunes issus de l'immigration, monde populaire, classes moyennes... Il y avait aussi des voitures qui flambaient à Saint-Brieux
Emmanuel TODD
"Notre classe dirigeante n'est pas au niveau"
Rue89, 28 novembre 2010

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